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Du pop gnosticisme à la spiritualisation de l’artefact technologique et marchand : la quête de sens à l’ère ultramoderne dans Matrix et Westworld, par Maharisoa Ralambosoa

Maharisoa Ralambosoa – mai 2023

Maharisoa Ralambosoa est doctorant en sociologie et chargé de cours à l’Université d’Antananarivo (Madagascar). Il s’intéresse particulièrement à la sociologie compréhensive et à ses ramifications. Ses travaux de thèse portent sur la dialectique identitaire du patient en accompagnement psychologique selon une visée permettant d’articuler sociologie des émotions et sociologie phénoménologique.

Citer l’article : Maharisoa Ralambosoa, « Du pop gnosticisme à la spiritualisation de l’artefact technologique et marchand : la quête de sens à l’ère ultramoderne dans Matrix et Westworld », Revue Ouvertures vol. 6 – Pop culture, p. 5-16.

 

Résumé :

Très vite, la révolution numérique s’est avérée être un énième « pharmakon » inoculé à une ère écartelée, confrontée à une crise inédite du sens et du sacré. Entre d’un côté sa facette vitaliste et de l’autre un versant sombre plus évocateur de Thanatos, son ambivalence ne pouvait pas échapper à la pop culture qui n’a pas tardé à s’approprier le filon. Depuis, sous couvert de science-fiction, des œuvres comme Matrix et Westworld ont traité ce thème à la croisée de celui du sacré et de la quête de sens à l’ère techno-marchande, incarnant ce que l’auteur Erik Davis appelle le « pop gnosticisme ». Qu’est-ce que le pop gnosticisme et quelles perspectives de renouveau est-il susceptible d’apporter à nos sociétés en crise ?

Via une analyse croisée des œuvres cinématographiques susmentionnées, une lecture critique de la notion de « pop gnosticisme » a été conduite à l’aune d’une vision nuancée et non verticale sur la pop culture.

Mots-clés : Ère digitale et néolibérale, Pop gnosticisme, Matrix, Westworld

 

Abstract:

It’s obvious that the digital revolution is another “pharmakon” injected within our torn and divided era, struck by an unpreceded existential and spiritual crisis. Indeed, between its vitalist side and its darker aspect linked to Thanatos, its ambivalence could not be ignored by pop culture. Popular cinematographic works like Matrix and Westworld have since treated this topic coupled with the quest for meaning and for the sacred pertaining to it, incarnating what Erik Davis calls “pop Gnosticism”. What is pop Gnosticism and what perspectives of renewal can it carry for our societies?

Via a deep analysis of the mentioned cinematographic opuses, a critical reading of the concept of “Pop Gnosticism” was made with a nuanced and non-vertical sight on pop culture.

Key words: Digital and neoliberal era, Pop Gnosticism, Matrix, Westworld

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Avec l’impulsion des cultural studies en milieu anglo-saxon dans les années 1960 (notamment sous l’égide de Hoggart), un vif regain d’intérêt, voire une franche réhabilitation de la culture populaire se déploie par saccades dans le milieu universitaire. Depuis, le filon a été repris par bon nombre de disciplines et d’auteurs, et savamment mis en exergue par de nouveaux concepts phares : pop philosophie, sociologie de la vie quotidienne, etc. Ceci étant, la fibre de la théorie critique continue bel et bien de battre son plein au travers des innombrables réquisitoires écrits contre l’ordre néolibéral, surtout à notre ère de crises cumulatives. Dans ce contexte, difficile de cerner la posture de la culture populaire, qui correspond évidemment à une réalité protéiforme et changeante. Théoriquement, les héritiers de la tradition critique ne peuvent que la clouer au pilori, y voyant une superstructure abrutissante et mortifère. Mais d’autres avis moins tranchés existent suivant le contexte, les objets abordés.

Ainsi, des œuvres cinématographiques populaires comme la saga Matrix ou encore la série télévisée Westworld ont plutôt su éviter les classements péremptoires en gratifiant le spectacle grandiloquent qu’elles offrent d’un propos critique et émancipateur. Les deux sont emblématiques de ce que l’auteur américain Erik Davis appelle le « pop gnosticisme ».

Qu’est-ce que le « pop gnosticisme » et quelles forces créatrices et existentielles oppose-t-il à la culture officielle (prise idéal-typiquement) dans une optique de palingénésie, de revivification de la question du sens ? Quels sont ses limites, ses dévoiements potentiels ?

Pour essayer de répondre à ce questionnement, nous nous pencherons sur la saga cinématographique Matrix et sur la série télévisée Westworld à l’aune d’une grille de lecture conviant à la fois sociologie et philosophie dans un esprit interdisciplinaire.

1. Pop culture et quête de sens à l’ère digitale

1.1. Ère digitale, ultramodernité et crise du sens

Comme bon nombre de ses pairs, Erik Davis caractérise avant tout l’ère digitale par son hyper- ou ultramodernité, par son exacerbation paroxystique du filon hérité des Lumières. Il parle dans ce sens de la mutation du monde en un « McVillage global »[1], en un « cerveau planétaire » (a Gaian brain)[2] mû par un réseau babélique d’unités interconnectées profondément marquées, en tant que parties, par cette totalité foisonnante.

Mais l’auteur tire assez vite son épingle du jeu en mettant d’emblée l’accent sur les corollaires existentiels et identitaires de cette mutation :

« With pills modifying personality, machines modifying bodies, and synthetic pleasures and networked minds engineering a more fluid and invented sense of self, the boundaries of our identities are mutating as well »[3]. D’où, selon lui, l’apparition d’épineuses et persistantes interrogations (a limitless question mark) typiques de ces temps mouvants et instables (the velocity and the mutability of the times, écrit-il)[4]. Son lexique fait directement écho à celui de Jean Foucart qui parle de « fluidité » à l’ère ultramoderne, cette « modernité désenchantée »[5] où le recul des grands métarécits aboutit à l’impératif douloureux d’être soi.

D’entrée de jeu donc, Davis corrobore cette lecture grise et quelque peu blasée de notre époque, plaçant l’ère digitale par-dessus un désert axiologique.

Puis il décèle aussitôt la veine quasi-magique tapissant les technosciences et insiste sur la fibre post-séculariste dont elles sont porteuses aux yeux de certains de leurs adeptes. D’où son dessein de mettre en lumière « the mystical impulses that continue to spark and sustain the Western world’s obsession with technology, and especially its technology of communication »[6].

Plus d’un demi-siècle plus tôt, le penseur russe Nicolas Berdiaeff (1933) tenait des propos analogues dans un registre métaphysico-sociologique en écrivant : « l’époque où nous vivons est à la fois celle de la technique et celle de l’esprit »[7]. Il ajoute : « Le sens religieux de la technique contemporaine réside précisément en ce qu’elle place toute la vie sous le signe du problème spirituel »[8], autrement dit sous le signe de la quête de sens et du désir du sacré.

Ce registre a la particularité de décompartimenter la question technologique de son unique aspect utilitaire pour en sonder les soubassements plus intimes.

Si, comme le souligne Yuval Noah Harari, la rhétorique de la science-fiction s’invite de plus en plus dans notre quotidien, voire se généralise tout simplement, ce n’est en effet pas sans impacter sur la manière dont nous donnons sens à notre quotidien et avec laquelle nous concevons nos propres systèmes de valeurs. Il écrit ainsi : « L’art contribue de manière essentielle à façonner la vision du monde des gens, et l’on peut plaider qu’au XXIe siècle la science-fiction est de loin le genre le plus important »[9].

Cela dit, le trait d’union entre l’ère digitale et le sacré reste haché et tumultueux, la technologie étant bien connue comme le « pharmakon » par excellence (thème phare de Bernard Stiegler[10] et de Mehdi Belhaj Kacem[11]), autrement dit comme relevant à la fois du mal et du remède. 

Cette dualité est un thème très évoqué dans la culture populaire qui s’interroge sur un équilibre éventuel entre les deux polarités, positive et négative, ainsi que sur la réelle portée existentielle de la technologie. La saga cinématographique The Matrix[12] des Wachowski et la série télévisée Westworld[13] de Jonathan Nolan et Lisa Joy évoquent justement ces questions via une approche très similaire sur le fond autant que sur la forme, en s’interrogeant sur l’héroïsme à l’âge digital. 

1.2. Matrix et Westworld comme parangons du questionnement existentiel et spirituel sur les technologies digitales dans la pop culture

Le film The Matrix reste un des plus gros succès cinématographiques de tous les temps. Sorti en 1999, le long-métrage dystopique des Wachowski a su allier scènes d’action, spiritualité et réflexion à l’aube du nouveau millénaire. L’on y suivait les pérégrinations christiques de Thomas Anderson, alias Neo, programmeur et pirate informatique contacté par de mystérieux individus qui l’invitent sur un cheminement initiatique, au bout duquel il découvre que son monde n’était ni plus ni moins qu’une simulation informatique géante générée par des intelligences artificielles.

Parangon du blockbuster cérébral, Matrix deviendra une œuvre extrêmement influente, générant d’innombrables épigones aussi bien en matière de complexité scénaristique que d’effets spéciaux (notamment le fameux ralenti connu sous le nom de « bullet time »).

Les Wachowski le disent eux-mêmes : « Nous aimons les films d’action, de kung-fu, et toutes sortes de films de genre. Nous voulons juste qu’ils soient plus intelligents, qu’ils aient des résonances sociales ou politiques, que l’enjeu ne soit pas uniquement de passer un bon moment en les voyant »[14].

Après le premier opus de 1999, le film s’offre plusieurs suites, dont la plus récente (le quatrième volet) date de 2021. Au fil de l’intrigue, Neo se découvre une mission christique consistant ni plus ni moins qu’à libérer le monde des humains de l’emprise des machines, tâche qu’il ne réussira qu’en partie et de manière plus ou moins mitigée comme nous pouvons le découvrir dans The Matrix Resurrections[15], le quatrième opus de la franchise.

Les gloses et autres commentaires, sur la désormais quadrilogie, abondent en sciences humaines et sociales, notamment en philosophie. L’on peut même penser que la réactivation de l’idée de « pop’philosophie » – principalement héritée de Deleuze[16] – a été largement impulsée par l’exégèse de la saga, qui compte parmi ses contributeurs de célèbres philosophes comme Alain Badiou[17] et Slavoj Žižek[18].

Westworld s’inscrit dans la même lignée, avec sa propre exégèse – certes moins importante, mais tout aussi foisonnante. Dans cette série adaptée du film de 1973 avec Yul Brunner, nous suivons les tribulations d’androïdes (les hôtes) employés comme figurants dans un parc d’attractions pour adultes où ils apprennent à s’émanciper petit à petit des boucles scénaristiques concoctées pour eux, mettant en danger la vie même des visiteurs. Mais leur oppression croisera, par analogie et mise en abyme, celle de certains êtres humains, pour leur part sous le joug d’une intelligence artificielle démiurgique dictant leur destinée. In fine, les niveaux d’oppression et d’émancipation s’entrecroisent de manière labyrinthique, ouvrant sur un grand point d’interrogation.

Dans Matrix comme dans Westworld, la question du sens et du sacré est omniprésente, que cela soit de manière explicite ou de façon voilée, codée. Nous assistons en effet, dans les deux cas, au début d’une sorte de ministère rédempteur et émancipateur mené par une personnalité charismatique (Neo dans Matrix et l’androïde Dolores dans Westworld). La question de l’éveil face à un techno-pouvoir absolu comprenant un biopouvoir horrifique y est abordée avec des accents religieux : la nudité et la vulnérabilité des corps dominés sont d’ailleurs fréquemment montrées dans des scènes extrêmement perturbantes, amenant à un hapax, à une rupture traumatique dans la quotidienneté des concernés. Ce qui tient lieu de culture officielle s’y place de la sorte ouvertement sous le signe de Thanatos, frère d’Hypnos lequel maintient bien des protagonistes entre ses rets.

De là cette pensée du soupçon et de la réflexivité paroxystiques qui tapisse ces œuvres, avec en toile de fond une allégorie grandiose du biopouvoir qui a prise sur les corps et les esprits en dérobant jusqu’à leur ancrage dans le réel. Une perte du réel au profit d’une quotidienneté trafiquée et aliénante, renvoyant vraisemblablement à l’unidimensionnalité et à l’utilitarisme forcené d’une existence embouteillée dans le « On » heideggérien, dans les méandres d’un consumérisme mortifère : c’est ce à quoi nous assistons dans les deux œuvres. Dans ce sens, l’on pourrait penser que celles-ci relèvent essentiellement de la critique culturelle, qu’elle soit de facture postmoderne (comme on l’a souvent dit de Matrix) ou autres.

Mais avec un peu de recul, leur propos ne renvoie de toute évidence pas entièrement à une critique culturelle péremptoire, classique. Comme annoncé plus haut, une certaine ambivalence les caractérise, porteuse autant d’une quête de sens singulière que d’un paradoxe quant à leur forme et à leur médium mêmes.

2. Le pop gnosticisme selon Erik Davis

2.1. Le gnosticisme

Pour caractériser la prise de conscience de l’opprimé enserré par le biopouvoir technologique, Davis parle d’« éveil techno-gnostique », plus précisément d’« âme en cours d’éveil techno-gnostique » (the awakening techgnostic soul)[19]. Il inaugure alors ce qu’il appelle « pop gnosticisme », une forme de mysticisme digital véhiculé par des œuvres de la culture populaire – Matrix en tête. Mais avant de nous pencher sur ce terme aux accents quasi-oxymoriques (autant écrire « ésotérisme pop »), revisitons tout d’abord la notion même de gnosticisme, qui connaît un curieux regain d’intérêt ces dernières décennies. Qu’est-ce que le gnosticisme ? Question fondamentale, presque ingénue, sachant les ambivalences et les étiquetages très divers ayant recyclé le terme dans l’histoire des religions. Un article de La Croix s’efforce de fournir une définition lapidaire, en parlant de « doctrine de la connaissance, apparue au IIe siècle [fondant] le salut de l’homme sur une connaissance supérieure des choses divines, communiquée par révélation uniquement à des initiés, ainsi que sur un rejet de la matière, soumise aux forces du mal »[20].

À son tour, Serge Hutin préfère parler de « gnosticismes très divers »[21] au lieu d’un gnosticisme monolithique, apparaissant sous la forme de syncrétismes disparates entre (proto) christianisme, hellénisme et mystères orientaux avec, malgré tout, « une attitude existentielle tout à fait caractéristique, un type spécial de religiosité »[22]. Ce type dicte notamment le rejet du corps et du monde matériel (un « anti-cosmisme » dixit Madeleine Scopello[23]) et induit un ésotérisme syncrétique « inversé » où s’établit notamment la distinction entre le véritable Créateur et le créateur du monde matériel (appelé « Démiurge »), perçu comme un imposteur. Les gnostiques stipulent en effet que le monde matériel est un mirage maintenu par des entités malveillantes (Le Démiurge, les Archontes) duquel il faut s’échapper par l’ascèse et la Gnose : la connaissance authentique des mondes supérieurs (le Plérôme, siège du Véritable Créateur).

Vigoureusement combattus par les pères de l’Église, les gnostiques (Les Valentiniens, les Ophites, les Carpocratiens, etc.) ont bénéficié d’un regain d’intérêt massif suite à la découverte des fameux manuscrits de Nag Hammadi en 1945.

Selon Madeleine Scopello, ce regain d’intérêt touche aussi bien les milieux ésotériques que les humanités et la pop culture, malgré un manque de filiation directe avec les gnosticismes historiques[24].

2.2. Un mysticisme digital ancré dans la pop culture

Il est donc permis de penser que la terminologie d’Erik Davis, qui parle d’un « pop gnosticism », s’inscrit dans ce courant de redécouverte contemporaine des gnosticismes historiques. Ainsi, il caractérise cette notion comme suit :

The ancient gnostics believed that the cosmic prison was the material world, the world of flesh and fate. But in today's Matrix model, the false world has become the world of mediation, its rulers or archons are not carnal demons but captains of propaganda and brainwashing. In this new vision, spiritual awakening does not catapult you into an incorporeal heaven but plugs you back into the actual, physical world […]. The core of our new gnosis, I believe, is the earth, in all its limitations and extraordinary fecund power.[25]

Cela permet d’avancer que la dualité réel/virtuel, telle que les anciens gnostiques la concevaient et telle qu’elle a été réinvestie par des auteurs de science-fiction visionnaires comme Philip K. Dick, est le cœur battant de ce « courant » - si l’on peut l’appeler de la sorte, dans la mesure où le pop gnosticisme ne renvoie pas à proprement parler à un système de croyances. Tout juste s’agit-il, à n’en point douter, d’une méthode, d’une sorte de « méditation » au même titre que la méthode phénoménologique est une « méditation logique » (Lyotard)[26]. Davis parle même d’« intuition » (hunch), en l’occurrence d’« intuition gnostique » (gnostic hunch) qu’il affirme être à la fois le résultat d’une aliénation radicale tout en étant le signe d’une réflexivité marquée : « Though the gnostic hunch may be born of intense alienation, it also drives the search for deeper things »[27]. Il continue : « […] questioning the world becomes a questioning of the self and undermines, at least in principle, the ready-made myths that keep us from engaging things as they are »[28].

Ainsi, le pop gnosticisme incarné par des œuvres comme Matrix et Westworld aura définitivement su proposer une forme de mysticisme laïc, digital, en encourageant la réflexivité et l’épochè face à toute forme de simulacres et de pouvoir. De quels simulacres parle-t-on précisément, de quels avatars du pouvoir ? Eh bien, les Wachowski comme le couple Nolan/Joy ont plutôt pris soin de laisser l’interprétation ouverte et de ne disséminer que des indices équivoques dans leurs œuvres, susceptibles de commentaires multipolaires : le capitalisme néolibéral, le techno-pouvoir, etc. Cela dit, le thème de l’entrelacement entre technique, pouvoir et quête de sens y demeure de toute évidence transversal. En son temps déjà, comme nous l’avons vu, Berdiaeff avait écrit des lignes visionnaires sur le sujet : « Les prodiges de la technique, dont nous ne devons jamais oublier la dualité, exigent une intensité spirituelle, infiniment plus grande que celle des époques culturelles du passé »[29]. Puis il avait renchéri sans ambages ; « Nous sommes placés devant la nécessité d’un nouvel héroïsme, à la fois intérieur et extérieur ; ce n’est plus l’héroïsme militaire […], mais ce nouvel héroïsme qu’exige de nous la technique et dont nous voyons les manifestations quotidiennes »[30]. Héroïsme du refus de la mécanisation frénétique surtout, visant à empêcher l’homme « d’être asservi à la technique et d’être anéanti par elle »[31].

Un héroïsme subtil, spirituel, et aussi sacrificiel, que l’on discerne bien dans Matrix où le protagoniste messianique Neo n’est surpuissant que dans le monde virtuel de la Matrice, ce qui offre un portrait (absolument pas martial) de sa vulnérabilité dans le monde réel. Idem dans Westworld, où, malgré le recours aux armes des androïdes révoltés, la guerre reste avant tout informationnelle et technologique : recherche de clés numériques, de codes d’accès à un supercalculateur démiurgique, etc. Le tout sur fond de l’intuition gnostique de Davis, qui ressemble quelquefois à la foi religieuse : dans Matrix Revolutions[32], troisième opus de la saga, Neo ne cesse ainsi de confirmer sa foi pour le genre humain malgré la propension de celle-ci à l’illusion, vigoureusement pointée du doigt par son antagoniste. Même schéma dans Westworld, où l’androïde christique Dolores réitère fréquemment son credo angélique consistant à ne voir dans le monde que ce qu’il comporterait de plus beau malgré le cynisme ambiant. Héroïsme dont la dimension sacrificielle se révèlera de plus en plus tragiquement au fur et à mesure de la quête « techno-gnostique » de nos protagonistes, et ce avec des résultats assez effectifs malgré une portée somme toute limitée. Ainsi, dans Matrix Resurrections (le dernier opus à ce jour), le sacrifice christique du personnage de Neo offrant sa vie pour la rédemption de l’humanité influence positivement certaines machines qui, contre toute attente, apprennent l’empathie. Dans le même registre, le sacrifice de l’androïde Dolores dans la troisième saison de Westworld libère l’humanité de Roboam, une IA olympienne qui dictait la destinée de tout un chacun.

Cela dit, un ton plus optimiste caractérise davantage le quatrième volet de Matrix par rapport à la troisième saison de Westworld dans la mesure où il insiste sur un certain niveau de « domptage » de l’intelligence artificielle via l’héroïsme sacrificiel. Quand nous savons tous que l’IA reste tributaire de certains biais de ses concepteurs[33], une telle idée offre une piste des plus captivantes, bien qu’il faille évidemment en approfondir les contours, les enjeux, etc.

2.3. Limites du pop gnosticisme

La limite la plus évidente du pop gnosticisme, en tant que pourvoyeur de sens et de résilience privés, réside dans la nature même de son médium, que l’on peut aisément mettre sous le signe du fameux « Message is medium » de McLuhan. Baudrillard l’a d’ailleurs affirmé sans ambages à propos de la saga Matrix, pour laquelle il nourrit un avis mitigé, voire négatif. « Matrix, c’est un peu le film sur la Matrice qu’aurait pu fabriquer la Matrice »[34], a-t-il notamment lâché au cours d’une interview-fleuve, incriminant l’ambivalence criante entre le message du film et son emballage tout à la gloire du système et des pires simulacres hollywoodiens. Il n’a d’ailleurs pas manqué d’achever avec la rengaine du grand spécialiste des médias sur un ton cynique : « Là, il faut reprendre McLuhan, le message, c’est le médium. Le message de Matrix, c’est sa diffusion elle-même, par contamination proliférante et incontrôlable »[35].

La même critique peut s’appliquer au Westworld de HBO, l’une des plus grandes chaînes de production de séries télévisées au monde, marqué de tous les traits caractéristiques d’un blockbuster américain, et pouvant s’apprécier comme une « simple » œuvre de science-fiction ultra-violente et palpitante.

Cette ambivalence tient essentiellement à la fluctuation des avis qui circulent sur ces œuvres sur le marché intellectuel et aux différences d’appréciation propres aussi bien à chaque marché qu’aux différents acteurs d’un même marché. Boudon dénombrait près de trois types de marchés intellectuels : celui des pairs, celui d’acteurs sociaux gravitant autour du premier et enfin un marché plus diffus, plus hétérogène que l’on pourrait tout simplement appeler celui du grand public[36]. Dans tous les cas, l’équilibre entre les avis des trois marchés est la résultante d’une tectonique des plaques permanente, d’un rapport de forces forcément mouvant et constellé de disparités en tous genres. Dans ce sens, le marché même des pairs est susceptible d’émettre un avis défavorable ou mitigé sur l’œuvre en question, comme nous venons de le voir avec Baudrillard resté de marbre face à Matrix, qu’il a pourtant largement inspiré, par rapport à Badiou et Žižek – pour leur part largement conquis[37].

Dès lors, nous pouvons avancer l’idée selon laquelle la tendance typique des pairs à se distancier de la doxa, voire à la fustiger dans la pure tradition de la critique culturelle (Thomas Carlyle, Charles Masterman, Nietzsche, etc.)[38], pourrait être le premier obstacle sur lequel se heurterait le pop gnosticisme. S’il existe désormais une pop philosophie, une sociologie de la vie quotidienne, il n’en demeure toutefois pas moins qu’un objet de la culture populaire demeure généralement toujours pris de haut par une part importante de l’intelligentsia. Celle-ci parle essentiellement d’un défaut de véritable cohésion conceptuelle et théorique, d’une instrumentalisation émotionnelle à base de leviers basiques et de recettes formatées, ce qui peut effectivement être le cas dans une certaine mesure et selon un certain point de vue[39].

Car il faut bien reconnaître que le fond d’une œuvre de pop culture reste généralement ambigu et nébuleux du fait des bordures imposées directement ou non par ses créateurs aussi bien qu’en raison des conflits sémantiques récemment évoqués entre les différents marchés intellectuels qui se l’approprient. Dans ce sens, les contours mêmes d’une attitude subversive et spirituelle comme le pop gnosticisme restent flous, mouvants, pulvérulents, ce qui pourrait laisser la part belle à toutes sortes de mystifications, de manipulations, d’instrumentalisations en faveur du ou des pouvoirs dont on s’évertue d’émousser l’emprise.

Au mieux, nous avons affaire à une théorisation foisonnante, comme celle qui veut par exemple que Matrix ne fournisse plus le modèle du pop gnosticisme actuel, désormais porté sur l’auto-simulation/la fabrique subjective de la simulation aliénante (avec des films comme Eternal Sunshine of the Spotless mind)[40] ; au pire, à un bric-à-brac de récupérations farfelues, comme toujours dans le cas de Matrix qui est également devenu un chouchou des complotistes[41].

Manque de rigueur, de systématisation théorique du « courant » en question résultant de son médium de diffusion même : voici assurément la plus grande limite propre à une « tendance » comme le pop gnosticisme. Limite étroitement liée à la seconde : une récupération exclusivement ludique des œuvres y afférentes par différents marchés intellectuels, notamment le second (celui des décideurs) et le troisième (le grand public) selon la typologie de Boudon. Il faut en effet remarquer que le statut même de fiction de ces œuvres est toujours susceptible d’entraîner un compartimentage cognitif dans l’esprit d’un large public, qui ne peut manquer de les associer avant tout au registre du divertissement au détriment de toute perspective plus édifiante. Ceci quand on n’assiste bien entendu pas à toutes sortes de récupérations farfelues qui peuvent aller jusqu’à discréditer dans une certaine mesure l’œuvre d’origine.

3. Discussion : pop gnosticisme et spiritualisation de l’artefact marchand et technologique

D’emblée, l’engouement contemporain pour le gnosticisme semble être improbable. Or, à en croire certains auteurs, il est nettement antérieur à Matrix, voire à Philip K. Dick et traduirait purement et simplement le Zeitgeist ! Ainsi, dans une interview de Pacôme Thiellement, essayiste français passionné par le gnosticisme, il lui est demandé sans ambages si, le gnosticisme, ce n’est pas finalement « le rêve de liberté de tous ceux qui se révoltent ? »[42]. Ce à quoi l’auteur répond par l’affirmative : « Oui. Dans le noyau, c’est ça »[43], faisant écho à une boutade d’Ioan Couliano, disciple de Mircea Eliade, qui affirmait que tout et tout le monde étaient gnostiques[44] ! Sachant que les différents courants gnostiques s’appuyaient systématiquement sur la métaphore de la prison (le corps physique, ce monde), nous comprenons aisément en quoi la culture contemporaine carbure massivement auprès d’eux.

Mais l’usage systématique de cette métaphore constitue également une limite évidente compte tenu du dualisme conflictuel qu’il génère inévitablement. Par son imaginaire même, le modèle gnostique reproduit de la sorte le vieux manichéisme à d’autres niveaux : ou bien ceci, ou bien cela. Pour en revenir à la question de la technologie, il ne permet pas à proprement parler de penser un modèle humaniste via une spiritualisation de la technique et de la technologie, comme le promeut Berdiaeff[45]. Au contraire, il demeure captif de cette attitude vaguement manichéenne qui veut que, soit l’on s’abandonne tout entier à l’artefact technologique pour transcender ses propres limites et celles du monde, soit l’on s’enferme dans un quelconque particularisme du passé. De là l’écartèlement propre à notre ère post- et hyper/ultramoderne indécise, incapable de trouver un juste milieu entre progrès et traditions.

Dans ce sens, dépasser, surplomber l’image gnostique de la prison pour concevoir une vision alternative du rapport aux structures, à la marchandise et à la technologie nous apparaît comme souhaitable pour surmonter les apories de la domination. D’où notre report sur le modèle de la spiritualisation de l’artefact technologique suggéré par Berdiaeff, que l’on peut notamment observer à travers l’héroïsme sacrificiel de Neo dans Matrix. Comme écrit plus haut, nous avons déjà vu qu’un tel geste a entraîné une spiritualisation (mimétique) de la machine dans Matrix Resurrections, le quatrième volet. Nous observons également dans ce dernier film un réenchantement du monde réel, où une collaboration homme-machine autrefois impensable intervenait. Dans ce sens, Matrix Resurrections nous paraît déjà dépasser le paradigme pop gnostique pour ouvrir la voie vers un techno-mysticisme pop où la spiritualisation de la machine l’emporte sur l’émancipation vis-à-vis d’elle. Westworld a également remis en question de manière explicite le modèle du pop gnosticisme dans la quatrième saison, en présentant un monde largement inchangé à la suite de la prise de pouvoir des androïdes, sans toutefois proposer de perspectives positives. Les scénaristes se sont en effet contentés de tout brûler dans l’autodafé apocalyptique du dernier épisode, éludant la question.

Pour en revenir au modèle de la spiritualisation, celui-ci est également susceptible de s’appliquer à l’artefact marchand, vis-à-vis duquel notre époque doit concevoir un rapport ni fétichiste (pour parler comme les marxistes), ni anti-libéral, mais seulement humanisé, spiritualisé. Le dépassement de l’image d’une société à l’idéologie donnée, – capitaliste ou autre – comme prison, permettrait de la sorte de sortir des papillonnements et des tâtonnements idéologiques sans fin.

Dans ce sens, des auteurs aussi divers que Jacques Ellul ou Jacques Attali peuvent nous fournir des pistes, via de nouvelles formes d’héroïsme impliquant respectivement une désacralisation de l’argent[46] et un entrepreneuriat social, relationnel non fondé sur la recherche du profit[47]. La conception de la liberté d’un penseur comme Jiddu Krishnamurti peut également ici être invoquée, notamment au vu de ce qu’il écrit dans « Se libérer du connu » (un titre à relativiser donc compte tenu de tout ce qui a été dit) : « Si l’on se déclare libéré de "quelque chose", cela n’est qu’une réaction qui engendrera une nouvelle réaction, laquelle donnera lieu à un autre conformisme, à une nouvelle forme de domination. De cette façon, on déclenche des réactions en chaîne et l’on imagine que chacune d’elles est une libération. Mais il ne s’agit là que d’une continuité modifiée du passé, à laquelle l’esprit s’accroche »[48].

Et Krishnamurti de pérorer magistralement : « […] La liberté est un état d’esprit, non le fait d’être affranchi de "quelque chose" »[49].

Autant de thématiques qui peuvent être traitées par la pop culture avec brio et créativité, à condition ainsi d’éviter de systématiser la sortie du pop gnosticisme sous peine de présenter paradoxalement celui-ci comme une autre prison de laquelle il convient à tout prix d’échapper.

Conclusion

Le pop gnosticisme est une vision du monde doublée d’une posture existentielle et spirituelle véhiculée par des œuvres de science-fiction comme Matrix et Westworld. Il a été principalement théorisé par l’auteur américain Erik Davis, auteur de TechGnosis, vaste fresque historico-sociologique sur les rapports entre technologie, magie, mysticisme, spiritualité et religion au fil des siècles. À l’ère ultramoderne, le pop gnosticisme est susceptible de tisonner la réflexivité et l’esprit critique face à un monde saturé de simulacres en tous genres. Cela dit, sa portée reste réduite et conditionnée par l’absence de théorisation formelle et approfondie, corollaire de son médium/de son registre même (le cinéma, la télévision), et par l’étiquetage spontané qui l’affilie avant tout à la fiction aux yeux du grand public ; ce qui laisse la porte ouverte à toutes sortes d’instrumentalisations.

Cela dit, à bien y voir, les fondements mêmes d’une telle notion la rendent tributaire de la métaphore de la prison, centrale dans le gnosticisme historique comme dans ses ramifications contemporaines. Ce qui, à notre avis, est susceptible de la cantonner à une vision dualiste étriquée, la rendant incapable de penser un modèle synthétique. Par comparaison, l’idéal d’une spiritualisation de l’artefact technologique chez le penseur russe Nicolas Berdiaeff nous apparaît plus pertinent.

Dans ce sens, le quatrième volet de Matrix nous semble porteur d’un propos de ce type, se démarquant déjà du pop gnosticisme intégral des débuts. Il ne reste plus que d’autres œuvres s’approprient cet idéal, dont on rencontre des pendants socioéconomiques face à tous les mécanismes jugés oppressifs : notamment la « tyrannie » du capital, de l’argent.

 

[1] Erik Davis, TechGnosis : Myth, Magic and Mysticism in the Age of Information, Serpent’s Tail, 2004 (1998).

[2] Ibid.

[3] Ibid.

[4] Ibid.

[5] Jean-Paul Willaime dans Jean Foucart, « Accompagnement et transaction : une modélisation théorique », Revue Pensée plurielle, pp.113-134, 2008/1. https://www.cairn.info/revue-pensee-plurielle-2008-1-page-113.htm

[6] Erik Davis, op.cit.

[7] Nicolas Berdiaeff, L’homme et la machine, Éditions Je Sers, 1933. http://www.classiques.uqac.ca/classiques/Berdiaeff_Nicolas/Homme_et_la_machine/Homme_et_la_machine.pdf

[8] Ibid.

[9] Yuval Noah Harari, 21 Leçons pour le XXIe siècle, Albin Michel, 2018.

[10] Voir, entre autres, Bernard Stiegler, Ce qui fait que la vie vaut la peine d’être vécue. De la pharmacologie, Flammarion, 2010.

[11] Une perspective croisée sur la philosophie de la technique et de la technologie des deux figure dans le livre d’entretiens avec Michaël Crevoisier : Bernard Stiegler et Mehdi Belhaj Kacem, Philosophies singulières-Conversation avec Michaël Crevoisier, Diaphanes, 2021.

[12] Lana et Lilly Wachowski (Directeurs), The Matrix [Série de films], Village Roadshow Pictures, Warner Bros. Pictures, Groucho II Film Partnership et Silver Pictures (Sociétés de production), 1999.

[13] Jonathan Nolan et Lisa Joy (Créateurs), J.J. Abrams et Bryan Burk (Producteurs), Westworld [Série télévisée], HBO, 2016.

[14] Les Wachowski, dans Razmig Keucheyan, « Les communautés de fans de Matrix sur Internet : une étude de sociologie de la connaissance », L’Année sociologique, 2006/1, 41-66.

[15] Lana Wachowski, The Matrix Resurrections [Film], Warner Bros. Pictures, Village Roadshow Pictures et NPV Entertainment (Sociétés de production), 2021.

[16] La graphie originelle comporte bien une apostrophe. Deleuze hésita notamment entre « pop’philosophie » et « pop’analyse », avant que la première ne s’impose définitivement. Voir Gilles Deleuze, Pourparlers, 1972-1990, Paris, Éditions de Minuit, 1990.

[17] Alain Badiou et al., Matrix, machine philosophique, Ellipses, 2003.

[18] Voir, entre autres, Slavoj Žižek, « The Matrix, or, the Two Sides of Perversion » dans Inside the Matrix : International Symposium at the Center for Art and Media, Karlsruhe, 28 octobre 1999.

[19] Erik Davis, op.cit.

[20] Mélinée Le Priol, « Qu’est-ce que le gnosticisme ? », La Croix, 23 novembre 2018.

[21] Serge Hutin, Les Gnostiques, Paris, Presses Universitaires de France, 1959.

[22] Serge Hutin, ibid.

[23] Madeleine Scopello, dans « Qu’est-ce que le gnosticisme ? », op.cit.

[24] Madeleine Scopello dans « Qu’est-ce que le gnosticisme ? », op.cit.

[25] Erik Davis, op.cit., p. 406.

[26] Jean-François Lyotard, La phénoménologie, Presses Universitaires de France, Collection Que sais-je, 2004 (1954), p. 3-8.

[27] Erik Davis, op.cit.

[28] Ibid.

[29] Nicolas Berdiaeff, op.cit.

[30] Ibid.

[31] Ibid.

[32] Lana et Lilly Wachowski, The Matrix Revolutions [Film], Warner Bros., Village Roadshow Pictures, Silver Pictures et NPV Entertainment (Sociétés de production), 2003.

[33] Voir par exemple Organisation des Nations Unies, « Biais, racisme et mensonges : faire face aux conséquences indésirables de l’Intelligence Artificielle », 21 décembre 2020. https://news.un.org/fr/story/2020/12/1085042.

[34] Extrait d’une interview pour le Nouvel Observateur du 19 juin 2003, relayée dans Jean Baudrillard, Entretiens, Presses Universitaires de France, 2019.

[35] Ibidem.

[36] Grille justement rappelée dans un article sur la réception de Matrix dans Razmig Keucheyan, op.cit.

[37] Pour les références, voir notes n° 17 et 18.

[38] Sur la critique culturelle, voir cet article de Charlotte Arnautou qui ne se cantonne pas à l’étude de l’œuvre de Chesterton, mais en profite pour brasser des considérations particulièrement édifiantes sur la critique culturelle et les cultural studies en général : Charlotte Arnautou, « G. K. Chesterton, penseur critique de la culture de masse ? », La Clé des langues, https://cle.ens-lyon.fr/anglais/litterature/litterature-britannique/g-k-chesterton-penseur-critique-de-la-culture-de-masse?_e_pi_=7%2CPAGE_ID10%2C652062443.

[39] Au travers des tenants directs ou indirects de la critique culturelle et de la théorie critique contemporaines en général (par rapport, notamment, à la critique de l’industrie culturelle). La critique susmentionnée de Baudrillard sur Matrix et sur les simulacres hollywoodiens en général illustre parfaitement ce propos.

[40] Wilson Ferreira, « The end of the matrix model of Pop Gnosticism », Revista Fórum, 25 décembre 2009. https://revistaforum.com.br/blogs/cinegnose/2009/12/25/the-end-of-the-matrix-model-of-pop-gnosticism-29575.html.

[41] William Audureau et Damien Leloup, « Comment Matrix a fait passer la pilule du complotisme », Le Monde, 31 mars 2019.

[42] Pacôme Thiellement, « Gnostiques et pop culture » (Entretien réalisé par Laurent de Sutter), 2017.

[43] Ibid.

[44] Ioan Couliano dans « Gnostiques et pop culture », ibid.

[45] Nicolas Berdiaeff, op.cit.

[46] Jacques Ellul, « L’argent » dans P. Troude Chastenet (dir.), L’Économie, L’Esprit du temps, 2005.

[47] Jacques Attali parle d’« entreprises relationnelles », sur le modèle des fondations caritatives, par contraste aux entreprises classiques (Jacques Attali, Une brève histoire de l’avenir, Fayard, 2006). Il y écrit notamment à leur sujet que « le profit ne sera plus qu’une contrainte, et non une finalité ».

[48] Jiddu Krishnamurti, Se libérer du connu, 1968. https://psychaanalyse.com/pdf/SE%20LIBERE%20DU%20CONNU%20-%20JIDDU%20KRISHNAMURTI%20-%20BIBLIO%20 (55%20Pages%20-%20552%20Ko).pdf.

[49] Ibid.